FEMMES AUX COMMANDES

Photos © Nathanaël Turpin-Griset.

Amandine Chaignot
a trouvé son palace

Avant de faire ses classes dans les cuisines de palaces, c’est Ă  la pharmacie qu’Amandine Chaignot se consacrait. Deux annĂ©es lui auront suffi pour dĂ©couvrir qu’elle rĂȘvait d’autres prĂ©parations magistrales! Et c’est un simple job dans une pizzeria de banlieue qui lui fait comprendre que l’on peut ĂȘtre heureux dans la restauration. L’histoire est savoureuse.

«Ma cuisine est le reflet de ce que je suis: franche, vive, actuelle.» Amandine Chaignot aime les dĂ©fis. A 33 ans, elle a dĂ©jĂ  travaillĂ© aux cĂŽtĂ©s des grands noms de la gastronomie française: Jean-François PiĂšge, Eric FrĂ©chon et Yannick AllĂ©no ; elle a passĂ© par des Ă©tablissements renommĂ©s, du Plaza AthĂ©nĂ©e au Bristol, passant par le Crillon ou Le Meurice, et terminĂ© 3e aux Bocuse d’Or de France en 2012, vĂ©ritables jeux olympiques de la cuisine… RĂ©cemment, la jeune femme a pris les commandes du resto du palace parisien Raphael, au 17, avenue KlĂ©ber (XVIe, Paris), avec une obsession: ne pas dĂ©cevoir. Sa face cachĂ©e: porter la casquette World Vision, association dont elle est la marraine.

A la tĂȘte d’une Ă©quipe de 17 personnes, dont seulement 2 filles, Amandine revisite au quotidien les classiques qu’elle aime tant, de la dorade aux joues de cochon braisĂ©es, passant par la canette de Challans. Elle qui chantonne souvent en travaillant met un point d’honneur Ă  ce que la bonne humeur soit en cuisine. Entretien haut en couleur et en saveur avec un immense talent de la gastronomie française.

La cuisine, ce n’était pas gagnĂ© d’avance, entre des parents scientifiques et des Ă©tudes en pharmacie. Retracez-nous votre itinĂ©raire

En abandonnant mes Ă©tudes de pharmacie en cours d’annĂ©e, j’ai pris un petit boulot de serveuse pour rassurer mes parents et gagner un peu d’argent. Certes, ce n’était pas trĂšs glorifiant, mais ce job m’a permis de dĂ©couvrir un univers totalement inconnu et l’énergie, l’agitation perpĂ©tuelle m’ont plu. Je me suis donc inscrite Ă  Ferrandi (l’école française de gastronomie) dans l’idĂ©e de passer un diplĂŽme pour monter un petit salon de thĂ©. Ensuite, les rencontres, les Ă©changes m’ont donnĂ© envie d’aller plus loin et d’apprendre.

Les femmes prennent de plus en plus d’assaut les fourneaux des grands palaces parisiens! S’agit-il d’une rĂ©volution de toques au fĂ©minin ou d’un coup mĂ©diatique?
L’évolution du matĂ©riel a permis Ă  des personnes moins rĂ©sistantes physiquement de pouvoir assumer ce mĂ©tier. Avant, entre les fourneaux Ă  charbon et les cuivres particuliĂšrement lourds, il Ă©tait difficile de pouvoir s’imposer si l’on n’était pas costaud… Ensuite, je pense que les femmes se sentent plus libres de faire un mĂ©tier prenant, que ce soit en cuisine ou dans d’autres domaines, car leurs compagnons sont plus ouverts Ă  l’idĂ©e d’assumer les tĂąches mĂ©nagĂšres. Si vous rĂ©fĂ©rez au fait que nous soyons 4 toques fĂ©minines Ă  prendre des positions similaires en mĂȘme temps (StĂ©phanie Le Quellec au Prince de Galles, Virginie Basselot au saint-James
), je pense que c’est un hasard.

Mais comment se comporter dans une brigade de mĂąles, mĂȘme si, en cuisine, c’est la compĂ©tence qui fait la diffĂ©rence
?
Ne jamais jouer la différence. Et gagner ses galons par la compétence et le travail.

Vous travaillez dans un décor de paradis, mais vous devez garder les pieds sur terre. Ordre, rigueur et précision sont-ils les 3 ingrédients incontournables?
Je suis la seule Ă  faire ce mĂ©tier dans ma famille et mon cercle d’amis. Ils me font redescendre sur terre, relativiser. Et puis, je suis marraine du projet 1Don1RĂȘve initiĂ© par la filiale française Vision du Monde, pour ne pas oublier qu’on a beau travailler dans le luxe, il y a toujours des personnes dans le besoin


Comment définissez-vous votre style culinaire et la grande cuisine?
Ma cuisine est comme moi. Je la veux simple, lisible, sans chichi
 Quant Ă  la grande cuisine, c’est arriver Ă  donner le mĂȘme moment d’émotion tous les jours.

Un plat doit-il mettre en Ă©veil nos cinq sens?
Tout commence évidemment par les yeux, puis viennent les odeurs, les parfums, ensuite, les textures et les goûts. Oui, tous les sens «se répondent», comme disait Baudelaire.

Votre premiĂšre Ă©motion gustative?
Des souvenirs d’enfance: les framboises cueillies sur les branches, juteuses, tiĂ©dies… Les tartes aux pommes de ma grand-mĂšre, des bugnes au carnaval qu’une maĂźtresse avait emmenĂ©es.

Quelle autre cuisine du monde vous a conquise?
La cuisine italienne. Enfant, nous sommes partis plusieurs fois en Italie avec ma mÚre. Je me souviens des marchés animés, des charcuteries de fou. Une palette de couleurs et de goûts incroyable.

Quel est le menu idéal ou thÚme phare du palace Raphael?
Nous faisons une cuisine de tradition française, dans la lignĂ©e des grandes tables bourgeoises du siĂšcle dernier. J’aime revoir les classiques comme les quenelles, les vol-au-vent
 Tout cela dans un esprit de convivialitĂ© et de partage.

Comment vous créez de nouvelles recettes?
Il n’y a pas de rĂšgles. Cela peut venir d’un souvenir Ă©voquĂ© avec un ami, d’un aliment redĂ©couvert chez une tante le week-end, des Ă©tals de marchĂ©…

Un grand chef, c’est quoi, au fond?
Beaucoup de travail et un tout petit peu d’idĂ©es.

Les 2 mots qui définissent le plus Amandine Chaignot?
Sincùre et, là, je sùche


Le dessert qui vous fait craquer?
Paris-brest de la PĂątisserie des RĂȘves.

Un rĂȘve encore non rĂ©alisĂ©?
Je me vois mal avoir 40 ans sans enfants, mais bon, chaque chose en son temps.

Si, demain, l’équipe de Cuiz’in vous invite Ă  dĂ©jeuner, quels plats libanais souhaiteriez-vous dĂ©guster?
Ceux que je ne connais pas! A part l’agneau et les poivrons, j’adore dĂ©couvrir des plats issus d’univers diffĂ©rents.

En guise de conclusion, que faut-il vous souhaiter?
D’ĂȘtre aussi heureuse demain qu’aujourd’hui.

Quenelles de volaille, morilles étuvées au jus, sauce poulette et pousses de pissenlit
Pour 4 personnes
l Préparation 30 mn
Pour les quenelles:

– 200 g de chair de volaille
– 200 g de crĂšme fleurette
– 2 blancs d’Ɠufs
Pour la garniture:

– 300 g de morilles
– 2 Ă©chalotes
– 1 botte de pousses de pissenlit
– 50 g de beurre
– 2 brins de thym
Pour la sauce:

– 200 g de bouillon de poule
– 100 g de crĂšme fleurette

1. Dans un mixeur, incorporez la chair de volaille avec les blancs et une bonne pincĂ©e de sel. Activez Ă  grande vitesse, jusqu’Ă  l’obtention d’une pĂąte. Ajoutez la crĂšme fleurette bien glacĂ©e petit Ă  petit, en rĂ©duisant la vitesse. Passez ce mĂ©lange au tamis fin, assaisonnez et rĂ©servez.
2.
A l’aide d’une petite cuillĂšre, formez de petites quenelles et pochez-les une Ă  une dans une grande casserole d’eau frĂ©missante, assaisonnĂ©e de sel et d’un bouillon cube. Pochez 3 mn de chaque cĂŽtĂ© et sortez-les dĂ©licatement avec une Ă©cumoire. RĂ©servez Ă  plat.
3.
Equeutez les morilles, puis lavez-les en changeant l’eau plusieurs fois. Egouttez, puis faites revenir dans une noix de beurre mousseux. Ajoutez les Ă©chalotes et laissez cuire Ă  couvert pendant 15 mn.
4.
RĂ©duisez le bouillon de volaille de moitiĂ© et ajoutez la crĂšme. RĂ©duisez Ă  nouveau de moitiĂ©, rectifiez l’assaisonnement et Ă©mulsionnez Ă  l’aide d’un mixeur plongeant.
5
. Dressez sur chaque assiette les petites quenelles, les morilles. Terminez avec la sauce poulette mousseuse et les pluches de pissenlit.

“Avant de servir, rĂ©chauffez les quenelles dans un peu de bouillon additionnĂ© d’une noix de beurre.”

Tartelette aux fraises des bois Ă  partager
Pour 4 personnes
l Préparation 45 mn

Pour la pùte sucrée:
– 40 g de beurre
– 25 g de sucre glace
– 65 g de farine
– 1/2 Ɠuf
– 10 g de poudre d’amande
Pour la crùme d’amande:

– 50 g de poudre d’amande
– 50 g de beurre
– 50 g de sucre
– 1 Ɠuf
Pour la crÚme fermiÚre vanillée:

– 80 g de crĂšme Ă©paisse de ferme
– 1/2 gousse de vanille
Pour la crĂšme chantilly:

– 100 g de crĂšme fleurette bien froide
– 10 g de sucre glace
– 1/2 gousse de vanille

1. Commencez par la pĂąte sucrĂ©e. Dans un saladier, mĂ©langez le beurre pommade, le sucre, la poudre d’amande et le demi-Ɠuf. Terminez avec la farine. Couvrez de film et laissez reposer au frigo 2 h.
2. Abaissez la pùte au rouleau, piquez-la avec une fourchette et foncez un cercle de 18 cm de diamÚtre. Laissez cuire au four à 170°C pendant 10 mn.
2.
Pour prĂ©parer la crĂšme d’amande, mĂ©langez dans un saladier le beurre ramolli avec le sucre, puis ajoutez la poudre d’amande et l’Ɠuf. Garnissez le fond de tarte prĂ©cuit et achevez la cuisson durant 15 mn Ă  170°C. La crĂšme d’amande doit prendre une jolie coloration.

3. Pour la crĂšme vanillĂ©e, fendez la vanille en deux (dans le sens de la longueur) et grattez les graines du dos d’un petit couteau. MĂ©langez bien avec la crĂšme Ă©paisse.
4. Il ne reste plus que la crĂšme chantilly. Dans un saladier bien froid, montez au batteur tous les ingrĂ©dients jusqu’Ă  bonne consistance.
5.
Montez la tarte en recouvrant la crĂšme d’amande de crĂšme fermiĂšre vanillĂ©e. Placez les fraises des bois une Ă  une, en commençant par l’extĂ©rieur, puis façonnez de jolies quenelles Ă  la cuillĂšre. Terminez avec quelques pluches de menthe, une touche de feuilles d’or et des petites meringues.

“Attention Ă  la prĂ©cuisson: le fond de tarte doit rester blanc.”

Les lĂ©gumes de JoĂ«l cuits et crus, rĂ©duction d’une bĂ©arnaise
Pour 4 personnes l Préparation 20 mn

– 1 botte d’estragon
– 6 asperges vertes
– 2 Ă©chalotes
– 2 Ɠufs
– 200 g d’huile d’arachide
– 30 g d’huile d’olive
– 8 mini-carottes
– 60 g de pois gourmands
– 1 betterave rouge
– 1 betterave jaune
– 10 mini-pĂątissons jaunes
– 12 mini-poireaux
– 4 feuilles de chou vert
– 150 g de brocoletti
– 8 mini-navets
– 150 g de vin blanc
– 1 trait de vinaigre blanc

1. Epluchez les Ă©chalotes avant de les ciseler et les incorporer dans une casserole Ă  fond Ă©pais, avec le vin banc et le vinaigre. Laissez cuire Ă  feu doux jusqu’à rĂ©duction complĂšte.
2.
Ajoutez les jaunes d’Ɠufs et montez Ă  l’huile, comme une mayonnaise. Mixez cette prĂ©paration avec l’estragon prĂ©alablement effeuillĂ©. Passez au tamis jusqu’à obtenir une crĂšme bien lisse. Rectifiez l’assaisonnement.
3.
Epluchez les betteraves rouge et jaune, les carottes et les navets. Lavez les feuilles de chou, les brocoletti et les mini-poireaux. Faites cuire tous les légumes séparément.
4.
Taillez les betteraves, une mini-carotte et une asperge en copeaux fins à l’aide d’une mandoline.

Sur chaque assiette, dressez une belle cuillerĂ©e de crĂšme d’estragon, puis disposez les lĂ©gumes harmonieusement. Assaisonnez avec un trait d’huile d’olive et une pincĂ©e de fleur de sel.

“Finissez le dressage avec les copeaux de lĂ©gumes crus et les pluches d’herbes.”

ƒuf mimosa à grignoter du bout des doigts
Pour 4 personnes (8 piĂšces)
l Préparation 20 mn

– 200 g de pain de mie
– 4 Ɠufs
– 150 g d’huile d’arachide
– 20 g de moutarde
– 1/2 botte de ciboulette

1. Taillez le pain de mie en tranches fines. Détaillez-y des ronds de 4 cm de diamÚtre et faites-les sécher entre deux plaques de pùtisserie.
2.
Avec un Ɠuf, la moutarde et l’huile d’arachide, montez une mayonnaise. RĂ©servez au frigo.
3.
Faites cuire les 3 Ɠufs restants dans de l’eau bouillante. Une fois bien durs, Ă©calez les Ɠufs. Taillez le blanc en dĂ©s bien rĂ©guliers et passez le jaune au fin tamis.
4.
Mélangez le jaune avec la mayonnaise et gardez ce mélange en poche à pùtisserie.

Tailler la ciboulette en biseaux.
5. Formez des sandwichs avec les croĂ»tons de pain et l’appareil Ă  jaune. Tenez-les Ă  la verticale.

“Achevez la prĂ©sentation avec un biseau de ciboulette et un dĂ© de blanc.”

Petits choux au jambon de Paris
Pour 8 piĂšces
l Préparation NC

Pour la pĂąte Ă  chou:
– 125 g de farine
– 20 cl d’eau
– 75 g de beurre
– 3 Ɠufs
– Sel
Pour la béchamel au jambon:

– 25 cl de lait
– 20 g de beurre
– 20 g de farine
– 2 tranches de jambon de Paris
– Sel, poivre

1. Commencez par rĂ©aliser la pĂąte Ă  chou. Dans une casserole, faites bouillir l’eau avec le beurre et du sel. Ajoutez la farine au fur et Ă  mesure, jusqu’à obtenir une pĂąte homogĂšne. Cassez et battez les Ɠufs. Hors du feu, ajoutez-les petit Ă  petit Ă  la pĂąte. Mettez en poche et formez de petites noisettes suffisamment espacĂ©es. Faites cuire 6 mn Ă  200°C. Laissez refroidir sur une grille.
2.
Pour la bĂ©chamel, dans une casserole, faites fondre le beurre. Ajoutez la farine et laissez cuire quelques minutes sans coloration. Versez le lait et remuez au fouet jusqu’à Ă©bullition. Rectifiez l’assaisonnement.
3.
Dans les tranches de jambon, taillez 8 petits ronds. Hachez le reste et incorporez-le à la béchamel.
4.
Garnissez les choux de béchamel et collez par-dessus un disque de jambon, avec un point de béchamel.
“RĂ©chauffez les petits choux 30 secondes au four avant de les dĂ©vorer.”