Thomas Keller

Paroles de Chef
Une toque pas comme les autres. Une toque concentrée sur le golf. «J’aime la détermination que cela implique, les rituels et la répétition. Tout cela contribue à faire de vous un bon cuisinier. Parce que j’aime la répétition.» A Relais & Châteaux, Keller se confie en toute sincérité: «Il y a eu plusieurs éléments dans le cheminement qui m’ont amené à devenir chef. En juillet 1977, j’ai rencontré le chef Roland Henin. Il a eu un très grand impact, m’a permis de faire le lien. J’ai appris l’activité physique qu’est la cuisine: faire 300 couverts en une soirée par exemple. Il m’a également fait comprendre l’importance d’impliquer d’autres personnes, car ce qui importe, ce sont les gens dans la salle de restaurant: il s’agit de les nourrir.» Sa plus grande émotion gastronomique? «Mon premier dîner chez Masa Takayama. Ce n’était pas seulement la nourriture. C’étaient les mouvements, les rituels, presque comme une danse, toutes les nuances qui sous-tendent la cuisine. Sa nourriture est extraordinaire. Les champignons grillés dans du parchemin, presque brûlé, la silhouette noire du champignon sur le parchemin. Ou l’entrée de caviar et toro! Le thé vert, presque fluorescent dans sa mousse, la sensation dans votre bouche.» Heureusement, le dieu des fourneaux est humain, que dis-je, comme vous et moi. «Si vous ratez quelque chose, vous pouvez malgré tout continuer. Si en tant que professionnels, nous ratons quelque chose et que nous ne recommençons pas, où en serions-nous?»

Le “colosse” qui a révolutionné la cuisine américaine

Restaurateur et auteur de livres de cuisine, Thomas Keller est l’unique chef américain à avoir reçu simultanément trois étoiles Michelin pour deux restaurants différents (The French Laundry, en 2005, et Per Se, en 2006, 6e resto mondial*). Au printemps 2012, ses homologues (sous-entendre: les grosses toques de la Grosse Pomme) lui rendaient hommage avec un Prix pour l’ensemble de sa carrière, remis par les organisateurs de la prestigieuse liste World’s 50 Best Restaurants. Qui oserait encore avancer que la cuisine américaine n’est pas réputée pour sa finesse?

On peut sans sourciller encenser la culture du snack, les incroyables hamburgers et steaks dry-aged, reste que la gastronomie ne fait pas partie des mœurs aux USA. Ou plutôt ne faisait pas. En effet, depuis une quinzaine d’années, les Etats-Unis vivent une véritable révolution culinaire, ne comptant plus uniquement sur les chefs français, italiens ou japonais pour rassasier les appétits de plus en plus pointus. Dans les grandes villes, la scène gastronomique est bouillonnante. Dans les rues et avenues de New York, sur les collines de San Francisco ou sur le Strip de Las Vegas (les trois villes qui possèdent désormais leurs propres éditions du Guide Michelin), les gourmets ne savent plus où donner de la tête. C’est dans ce contexte qu’intervient Keller. Admirateur. «Quand Bocuse vous appelle pour vous demander si vous souhaitez devenir le président de l’équipe américaine du Bocuse d’Or, vous dites: oui, chef! C’est le modèle, l’icône.» Admirable. Car l’Américain a réussi, par son seul talent, à rejoindre le cercle très fermé des toques mondiales à posséder deux enseignes triplement étoilées. Le cercle compte cinq chaires au total et, si vous voulez le savoir, les voisins de Keller se nomment Alain Ducasse, Joël Robuchon, Marc Veyrat et (feue) Eugénie Bazier!
C’est que Thomas K. a fait son apprentissage dans plusieurs établissements étoilés Michelin en France, dont Guy Savoy et Taillevent, avant d’importer aux States les idéaux de la cuisine française classique. Véritable figure emblématique de la gastronomie avec son restaurant The French Laundry, en Californie, il a révolutionné la cuisine dans son pays natal en combinant des techniques so french et des ingrédients provenant de producteurs locaux. Avec ses 8 restaurants (le bistrot français Bouchon à Beverly Hills, New York et et Las Vegas, Ad Hoc en Californie, etc.)et 2 boulangeries présents aujourd’hui sur les côtes est et ouest des USA, le talentueux Américain est adulé. Elu Meilleur chef d’Amérique en 1996 par la James Beard Foundation et en 2001 par Time Magazine, il rafle la première place au Top 50 établi par Restaurant Magazine pour son French Laundry, voté Meilleur restaurant au monde (en 2003 et 2004), puis des Amériques (jusqu’en 2008). Même le CIA (Institut culinaire d’Amérique) le sacre Chef de l’année. Ce dernier hommage fait au printemps 2012 pour l’ensemble de sa carrière semble donc n’être qu’une simple formalité pour le Tablier qui porte la Légion d’Honneur française depuis 2011. «Le respect de l’aliment est le respect de la vie, de ce que l’on est et ce que l’on fait.» Comme il a raison. Pour notre plus grand bonheur, Thomas Keller a bien voulu partager avec Cuiz’in quelques-unes de ses recettes les plus faciles, dont le poulet rôti, son “préféré”.

* Au classement S.Pellegrino des 50 Meilleurs restaurants du monde.

Photo © Deborah Jones

Mon poulet rôti préféré

Pour 4 personnes l Préparation 30 m

– Un poulet fermier
– Sel
– Poivre fraîchement mouliné
– 2 c. à c. de thym haché
– Beurre non salé
– Moutarde de Dijon

1. Faites chauffer le four à 240°C. Lavez, rincez et séchez minutieusement le poulet avec du papier absorbant.
2. Salez et poivrez la cavité. Ficelez ensuite la volaille. La ficeler lui permet de rôtir de manière uniforme et le résultat final est plus agréable au regard! 
3. Salez le poulet en pluie fine pour une couverture uniforme, qui donnera une peau croustillante à souhait et pleine de saveur. Pour doser, utilisez une cuillère à soupe de sel. Poivrez à votre goût.

4. Enfournez. Après 50 à 60 mn, vous devriez voir des morceaux de sel bien rôtis sur la peau. Sortez le poulet et ajoutez le thym. Arrosez-le de ses jus et du thym, puis laissez reposer 15 mn sur une planche à découper. 
5. Retirez la ficelle, les cuisses et pilons. Coupez la poitrine au milieu et servez-la sur l’os, avec un joint de l’aile encore attaché. Recouvrez la viande de beurre frais.

6. Servez accompagné de moutarde à côté et, si vous le souhaitez, d’une petite salade verte. 

“Vous commencerez avec une fourchette et un couteau, et vous terminerez avec vos doigts. C’est tellement bon!”

Pudding de pain aux poireaux
Pour 12 personnesl Préparation 60 mn

– 2 tasses de blancs de poireaux (aux tiges tendres) coupés en morceaux de 1 cm
– Sel
– 4 c. à s. de beurre non salé
– Poivre noir fraîchement moulu
– 12 tasses de pain de mie coupé en petits cubes
– 1 c. à s. de ciboulette hachée finement
– 1 c. à c. de thym frais haché
– 3 gros œufs
– 3 tasses de lait entier
– 3 tasses de crème épaisse
– Noix de muscade fraîchement râpée
– 1 tasse de comté ou d’emmental râpé

1. Lavez et égouttez les poireaux. Salez et placez dans une sauteuse à feu moyen environ 5 mn. Réduisez le feu, ajoutez le beurre et laissez cuire à feu doux environ 30 mn, en remuant occasionnellement. Assaisonnez suivant le goût.  

2. Préchauffez le four à 180°C. Etalez les cubes de pain de mie sur une planche. Faites dorer en les retournant souvent, puis réservez dans un bol.

3. Incorporez les poireaux cuits, la ciboulette et le thym dans le bol de pain. Mélangez bien. Dans un autre grand bol, fouettez légèrement les œufs, puis versez le lait, la crème, une pincée de sel, de poivre et de noix de muscade.

4. Saupoudrez 1/4 de tasse de fromage râpé au fond du moule de cuisson. Couvrez avec la moitié du mélange de pain, puis mettez de nouveau 1/4 de tasse de fromage, et ainsi de suite. Pour terminer, versez le mélange lait et œufs en quantité suffisante pour bien couvrir la surface du moule, en pressant légèrement sur le pain afin de bien l’imbiber. Laissez reposer 15 mn.

5. Ajoutez le reste du mélange lait et œufs de manière à faire sortir en saillie les cubes de pain. Assaisonnez de sel, rajoutez le fromage restant et enfournez 90 mn environ. Servez bien chaud.

“La cuisson est terminée lorsque la surface du pudding est bien dorée.

Chocolat en bouchons
Pour 12 bouchons l Préparation 45 mn

– 3/4 de tasse de farine
– 1 tasse de cacao en poudre non sucré
– 1 c. à c. de sel
– 3 gros œufs
– 1 1/2 tasse + 3 c. à s. de sucre granulé
– 1/2 c. à c. d’extrait de vanille
– 1 1/2 tasse de beurre fondu légèrement tiède
– 170 g de chocolat mi-sucré (coupé en pépites)
– Beurre et farine pour les moules
– Sucre en poudre

1. Mélangez dans un bol la farine, le cacao et le sel.
2. Fouettez les œufs et le sucre pour obtenir un mélange homogène. Ajoutez un peu de vanille, de mélange farine cacao, puis de beurre. Continuez à alterner jusqu’à épuisement des ingrédients. Incorporez le chocolat et fouettez à petite vitesse jusqu’à homogénéisation.
3. Préchauffez le four à 180°C. Beurrez et farinez 12 moules, que vous déposerez sur une planche allant en four.
4. Avec une poche à douille, remplissez chaque moule aux deux tiers. Faites cuire les bouchons environ 20-25 mn, jusqu’à dorer parfaitement le sommet.
5. Laissez refroidir les bouchons sur une grille avant de démouler. Saupoudrez de sucre en poudre et servez avec une glace au choix.